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Le magazine de l’actualité musicale en Fédération Wallonie - Bruxelles
par le Conseil de la Musique

Melanie De Biasio

Lay your ear to the rail

JACQUES PROUVOST

Tous les deux ans, Europalia consacre son festival à un pays ou un thème. Cette année, c’est le rail qu’il célèbre (Trains & Tracks). Dans ce cadre, le Musée de la Photographie de Charleroi a proposé à la chanteuse Melanie De Biasio de «refaire le chemin à l’envers».

Elle est donc retournée sur la terre de ses aïeux, s’est replongée dans les souvenirs et les parfums du passé pour revivre cet exode aussi douloureux que plein d’espoir. Au second étage du musée, au bout du long couloir, on entre dans un tout petit espace: la Black Box. Dans le noir complet, des chants d’oiseaux, le souffle d’un vent doux, le bruissement des feuilles et les rires d’enfants envahissent le compartiment. Des images, filmées par Melanie elle-même, apparaissent sur l’écran: des photos souvenirs d’après-guerre, des coupures de journaux, quelques lettres et puis, au travers des fenêtres d’un train, les paysages italiens commencent à défiler. Les vallées arborées sont gorgées de soleil. L’image, en noir et blanc, très contrastée et extrêmement lumineuse, flotte et tremble fébrilement. La voix fragile et lointaine de Melanie se fait entendre sur un tapis sonore bourdonnant et obsédant. Le voyage continue en un long travelling glissant sur plus de 9 minutes quarante et nous entraîne au plus profond de nos souvenirs et de nos émotions. Le chant est hypnotique, fantomatique et répétitif, comme celui des boggies sur les rails. Lay your ear to the rail, psalmodie Melanie De Biasio. Le son du Wurlitzer de Pascal Paulus se déforme, amplifie la mélodie, la rend brumeuse et sourde, comme le battement d’un cœur. L’image devient abstraite, seule une silhouette en contrejour se laisse traverser par le rail qui l’emmène vers l’ailleurs. Là-bas. La Belgique, sans doute, et ses mines de charbon… La voix monte, descend, se cache, disparaît et se confond avec le tempo et la respiration. Les traits et les traces disparaissent, la lumière devient aveuglante. À nous d’inventer la suite de l’histoire, Melanie nous a mis sur la voie.

Europalia – Trains & Tracks – Musée de la Photographie Charleroi
Musique: Pascal Paulus, Melanie De Biasio
Paroles: Gil Helmick, Melanie De Biasio
Images: Melanie De Biasio