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par le Conseil de la Musique

Alex Koo

Du jazz sous influence

Dominique Simonet

Avec son nouveau disque ou en concert, le jeune pianiste séduit par son jeu plein de couleur et d’émotion. Au carrefour de différentes cultures, féru de jazz, sous influence classique, Alex Koo est, sans conteste, l’une des révélations du moment.

Alex Koo

Il est l’une des personnalités musicales qui émergent en Belgique, débordant des frontières comme des styles : formé au classique, expérimenté en jazz, le pianiste Alex Koo enrichit de ce double parcours son projet solo actuel, Études for Piano. C’est ainsi qu’on l’a vu l’an dernier en trio avec basse et batterie au Gaume Jazz d’Automne, à Rossignol, puis en solo, cette année, à Flagey et au Singel, pour la présentation de l’album. Bluffant à chaque fois.

Alex Koo
Laisser courir les notes en fonction des émotions.
C’est mon rêve de jouer comme ça.


Alex Koo a tâté de la musique très jeune, à 5 ans : « Ma mère, Yuko Matsubara, joue du piano et comme, gamin, j’étais intéressé, elle m’a expliqué comment ça marchait », sourit-il. Avec deux frères violonistes, dont l’un professionnel au London Philharmonic et à Bornemouth, toute son enfance a été baignée dans la musique classique. « Ça m’a aidé au niveau développement musical », admet-il volontiers.

Du côté de sa mère, sa famille est implantée à Fukuoka et à Hiroshima, dans le sud de l’archipel japonais, « où les gens sont plus sympas et plus cool qu’ailleurs dans le pays ». Son père, Wilfried Derudder, est Limbourgeois, lui-même étant né à Waregem : « J’ai eu tellement de soucis avec Derudder, qui était déformé de toutes les façons, en Rubber ou autre chose, que j’utilise Koo, mon nom chrétien », sourit-il à nouveau.

Comme à la mer

Suivant une formation pianistique depuis l’âge de 6 ans, c’est à 16 qu’il opte pour « le jazz improviséet la composition », pour une question de « liberté ». Pourtant, le titre de l’album, Études for Piano, fait très classique… Mais, pour lui, le terme “études” recouvre un concept plus large : « Au départ, dans une étude, il y a une idée physique et celle-ci se développe dans un morceau. Avec ses Études, Chopin est le parfait exemple, parce qu’il part toujours d’une certaine position de la main, d’un certain mouvement des doigts ».

« Une bonne étude, c’est comme la mer qui nous fascine quand on la regarde, toujours la même, toujours le même mouvement des vagues, avec des petites variations. Dans sa simplicité, l’étude réserve à tout instant des petites surprises. Elle est la meilleure représentation naturelle quand on écrit pour l’instrument qu’on explore. » Tel est le propos de ce nouvel album qui fascine par sa diversité d’approches et de couleurs.

Sans conteste, on y entend les influences des impressionnistes comme Ravel et Debussy, de Chopin et Messiaen, de Rachmaninov également, « ainsi que des compositions et des harmonies du jazz, le meilleur moyen de trouver la liberté au niveau de l’improvisation », relève-t-il. Morceau dédié à sa fille, un petit bout’chou de 20 mois, Luna Umi commence par un exposé du thème d’environ quarante secondes, thème que l’on retrouve, pour une trentaine de secondes à la fin. Entre les deux, six minutes d’impro.

Mêmes sources, autres effets

Alex Koo reconnaît également l’influence des minimalistes comme Reich et Glass, sur deux titres de l’album. S’il comprend pourquoi, de ce fait, certaines personnes tendent à l’associer au courant néo-classique en vogue, le pianiste réfute toute intention de ce genre : « Je ne me considère pas du tout comme ça, ce n’est pas mon but, » dit-il. Même si DbREAM, qui clôture l’album, évolue selon les principes de Steve Reich, « ça commence comme du Chopin », précise-t-il. Si les influences sont parfois similaires à celles du néo-classique, le résultat ne l’est pas du tout. Lui est bien trop romantique pour ça.

Le pianiste dit encore jouer un peu de Bach, notamment les Variations Goldberg, excellent exercice au demeurant. Parmi elles, certaines pièces ont été terminées par d’autres compositeurs que le Cantor de Leipzig, leur final figé ensuite dans le temps. « Alors, je refuse de jouer ça, et j’improvise ! », lance-t-il. D’ailleurs, cet espace n’avait-il pas été laissé ouvert pour ça ? Improvisations jamais perdues : « J’ai un petit carnet où je note ce que je travaille, ce que j’essaie, rassemblant des idées fragmentées que je peux implémenter dans d’autres pièces ».

Improviser sans penser aux harmonies, « mais en laissant courir les notes en fonction des émotions », tel est le but actuel d’Alex Koo, et ce qui fait le charme de sa musique : « Alors, je suis content. C’est mon rêve de jouer comme ça ».


Alex Koo
Études for Piano
W.E.R.F. Records