Hidden Gnawa Music in Brussels
Jola
Muziekpublique Records
Les thèses universitaires ne sont pas que blablabla et digressions intellectuelles. Hélène Sechehaye peut en témoigner. Fruit de ses recherches académiques, l’album Jola rassemble aujourd’hui les incantations d’une diaspora gnawa ancrée au cœur du microcosme bruxellois. « La quarantaine de musiciens qui jouent ici ne forment pas un groupe en dehors du disque », raconte la musicologue. « Ils ont pour point commun de partager des traditions héritées de leurs maîtres. Certains ont choisi de consacrer leur vie à la musique. D’autres ont des métiers très différents et ne jouent qu’à la maison, dans l’intimité du salon. Tous les rencontrer et les rassembler est le résultat de cinq ans de travail. C’est pour cela que l’album s’intitule Hidden Gnawa Music in Brussels. » Inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité depuis l’an dernier, la culture gnawa porte en elle des mélodies d’une richesse inouïe. Entre danses, parades tambourinées, croyances religieuses et transes mystiques, cette musique issue de l’esclavage subsaharien au Maroc envoûte désormais les âmes sous le ciel bruxellois. Déracinés depuis une vingtaine d’années, les descendants de cette peuplade d’Afrique du Nord ravivent les rituels d’autrefois. « Par essence, les Gnawa sont déracinés : ils ont été capturés dans divers coins d’Afrique puis, emmenés vers le Maroc. Depuis toujours, ils perpétuent un héritage ancestral au sein d’une nouvelle société. En ce sens, les Gnawa de Bruxelles ne sont pas différents de leurs ancêtres arrivés au Maroc il y a des siècles. Je crois même que le fait d’avoir vécu personnellement un déracinement les rapproche d’autant plus de l’esprit des premiers Gnawa. » Leur musique, en tout cas, enchante à jamais sous la pochette de Jola.